Escapade en Haute Corse
La compagnie maritime “Moby” nous proposait, le 9 juin dernier, de tester sa ligne Nice-Bastia-Nice à bord du ferry “Moby Dada” pour une brève incursion sur l’Ile de Beauté. Cette opération de communication était organisée conjointement par Moby, la CCI Nice Côte d’Azur et Riviera Ports et la CCI Territoriale Bastia Haute Corse.
Juste le temps d’une courte visite à Bastia, dans le Nebbiu et San Michele de Murato, puis Patrimonio, à la découverte du vin et de la Confrérie et enfin, à Saint-Florent, pour finir la journée sur le port. Un éphémère passage qui ne peut que donner l’envie d’y revenir très vite !
Bienvenue à bord
Embarquement rapide… Il est vrai qu’il n’y a pas encore l’affluence estivale ! La spécificité de Moby Dada est de ne pas proposer de “sièges” pour la traversée. Uniquement des cabines (Intérieures ou extérieures et suites). Le navire, élégant avec ses bars, ses restaurants, sa boutique, son animation… veut plutôt donner dans la version “croisière” ! D’ailleurs, des “packages” de 4 jours/3 nuits sont proposés hors-saison à des tarifs préférentiels.
Au restaurant “A la Carte” à l’ambiance feutrée et au menu italien, on est loin du brouhaha des selfs, coutumier sur les ferries… Le plaisir de naviguer peut déjà s’afficher… Une nuit sans problème et sans bruit, et nous voilà déjà, après un copieux petit-déjeuner, prêts à visiter Bastia dont l’approche par la mer révèle bien cette proximité immédiate de la montagne. Site : mobylines.fr
Bastia, moteur économique de la Corse
Nous avons rendez-vous avec Sylvia qui sera notre guide (Photo à gauche) au cours de cette journée. Sylvia est Corse, bien sûr, et qui, mieux qu’une Corse, peut vous parler de ce pays si cher à son coeur, de cet esprit “bastiacciu” dit-elle, fait de religion, de ferveur, d’entraide, de négoce, de goût d’entreprendre, d’exilés revenus… Une ville d’art et d’histoire où descendaient les têtes couronnées… Une ville au port très actif, premier port de Méditerranée et 2ème port français après Calais !
La visite peut commencer Place St-Nicolas, l’une des plus vastes d’Europe où se déroulent des évènements toute l’année. Sylvia aime évoquer les gens d’hier pour mieux nous faire comprendre la réalité d’aujourd’hui… Un passé souvent difficile et miséreux traduit dans l’art, comme ce bronze du monument aux Morts des deux guerres immortalisant le geste d’une mère corse qui donne son troisième fils (plus petit qu’elle) à la Mère Patrie !
Toujours sur la Place Saint-Nicolas, voici la boutique “Cap Corse”, l’une des plus anciennes façades de la ville (reconnue Monument Historique) dernièrement restaurée en un “Concept Store” par trois entrepreneurs associés. A l’intérieur, tout en bois rouge, on retrouve l’apéritif mythique inventé par un certain Louis Napoléon Mattei qui naquit dans le Cap Corse en 1849. Il y inventa son fameux vin cuit à base de plantes locales en 1872 qui fut exporté jusque dans les colonies. Aujourd’hui, viennent s’ajouter à l’inventaire les produits du terroir, la bière corse, bougies parfumées, cosmétiques, biscuits, objets vintage…toute une gamme régionale qui fait de la boutique un must de la ville !
Ancienne forteresse appuyée au donjon et agrémentée d’un campanile du 16ème siècle, le Palais des Gouverneurs génois monte la garde sur la citadelle Terra-Nova et, par delà les remparts, sur le Vieux-Port dominé par l’église Saint-Jean-Baptiste avec ses deux campaniles.
Ce quartier en mouvement, presque entièrement restauré, devient branché offrant un sublime panorama sur le Golfe. A l’intérieur du Palais des Gouverneurs, le Musée Municipal ancien musée d’ethnologie Corse, retrace l’histoire de la ville depuis ses origines.
En voiture vers le Nebbiu
A peu de distance de Bastia, le véhicule d’Ange Antoniotti se dirige vers le Nebbiu… Une région naturelle de Haute-Corse s’étendant autour de Saint-Florent, à l’ouest du Cap Corse.
L’étymologie fait remonter le nom de la région à son caractère nébuleux (en corse nebbia, brume). Pascal Paoli, père de la Corse, la surnomma « Conca d’Oru » (coquille d’or) à cause des champs de blé qui y fleurissaient alors. Nous arrivons à Murato pour découvrir l’église San Michele construite au 12ème siècle par les Pisans. D’architecture romane, c’est l’une des plus belles de Corse avec sa façade de pierres polychromes. La légende dit qu’elle aurait été bâtie par des anges en une nuit. Les blocs de serpentine verte se marient au blanc du calcaire. Deux représentations insolites posent questions explique Sylvia : une fusée, étonnant en cette époque médiévale et une main… qui a la spécificité d’avoir 6 doigts !
La Bergerie de Victor et Andrée Antoni “U Pagliaghju San Michele » à côté de l’église offre des terrasses rafraîchissantes sur le golfe avec un panorama grandiose. “U Pagliaghju”, c’était le lieu où le blé était battu après la moisson. Des petites cabanes de pierre comme les bories provençales… Père et fille ont restauré leur patrimoine et créé une étape gourmande avec un menu composée de produits du terroir : charcuterie, beignets au fromage “Migliaccioli”, courgettes et tomates farcies au brocciu, travers de porc et fiadone en dessert… Un vrai régal servi par des Corses authentiques et généreux. (Pas de site internet, juste un téléphone pour réserver : 06 79 66 96 41).
La Confrérie San Martinu à Patrimonio
Fin d’après-midi, et moment de culture traditionnelle à Patrimonio, église San Martinu, afin de comprendre un peu mieux ce que sont ces mystérieuses confréries ? Apparues en Corse au 15ème siècle sous l’emprise des ordres monastiques dont les franciscains, ce sont des associations de laïcs structurées autour de l’église à travers les chants sacrés polyphoniques et leurs rituels. Elles connaissent un renouveau aujourd’hui comme nous l’explique Christian Andreani, responsable de celle de San Martinu à Patrimonio. On en recense environ 80 comprenant 3.000 membres.
“Ce patrimoine immatériel, poursuit-il, tire ses sources dans l’histoire de la Corse. Les confréries assistaient la lithurgie mais étaient aussi commanditaires d’oeuvres d’art. Dans tout ce que nous chantons nous avons seulement des traditions orales. Il y a des chants qui viennent du 3ème siècle ! Notre esprit est confraternel et solidaire. Tous le monde peut entrer dans la confrérie… après avoir été initié deux ans”. Au cours de la Semaine Sainte (Pâques), les confréries font de nombreuses processions dans leurs étranges costumes…
Patrimonio : des vins appréciés depuis l’Antiquité
La légende dit que lors d’un séjour en Corse, San Martinu gravit les pentes du col de Teghime et découvrit la vallée de la Conca d’Oru. Devant la beauté du site, il tendit son doigt en disant : « Ecce mio patrimoniu. Ceci est mon patrimoine ». Patrimonio était baptisé ! Le diable, toujours en conflit avec San Martinu, lui disputa le territoire, mais ce dernier le bouta hors de la plaine pour le précipiter dans les remous du Golfe de Saint Florent !
Sous l’Antiquité, les vins de Patrimonio étaient déjà appréciés. Les phéniciens y ont planté les premières vignes au 5ème siècle avant J.C. ! La Route des Vins “A Strada Vinaghjola” vous conduira à travers 35 domaines de l’Appellation d’Origine Contrôlée de Patrimonio dont 22 certifiés “bio”. Une surface de 500 hectares où le calcaire règne entre schiste et granit. Le vignoble s’enrichit de l’AOC Muscat du Cap Corse et de l’AOC Côteaux du Cap Corse.
Les vins de Patrimonio furent les premiers à obtenir la célèbre accréditation AOC en 1968. Les propriétés viticoles sont plutôt petites (20 hectares) ce qui leur confère un charme tout particulier et surtout participe à l’élaboration artisanale des vins du fait d’une production limitée. Les cépages utilisés sont authentiquement corses (Niellucciu et Vermentinu) et ne pâtissent pas de l’adjonction de produits chimiques du fait de méthodes d’encépagement et de vinification ancestrales. Nous avons pu déguster, devant le parvis de l’église, la production de Jean-Baptiste Arena et de Serge Dominici pour le Muscat. Tout le terroir se révèle dans ces arômes !
Saint-Florent, le petit Saint-Tropez corse
Nichée au fond de son golfe, la ville de Saint-Florent « San Fiurenzu », avec son port de pêche et de plaisance est l’une des stations balnéaires les plus courues de l’île. Festivals, vignobles et plages remarquables lui ont même valu le surnom de « Petit Saint-Tropez ».
Saint Flor fut un jeune soldat romain martyrisé au 3ème siècle. La légende, rapporté par Prosper Mérimée, dit que le jour de sa fête, un parfum de violette se diffuse de la cathédrale. La châsse en bois doré contenant ses reliques est portée en procession tous les 3 ans le lundi de Pentecôte. La cité fut construite en 1440 au pied de la citadelle, sous sa protection. Elle renfermait un couvent de Franciscains depuis longtemps détruit. La citadelle surveille le golfe qu’elle domine. Elle fut tour à tour génoise, aragonaise, française, anglo-corse, italienne et bien sûr corse. Siège du Gouverneur du Nebbio, elle finit caserne de gendarmerie !
L’amiral Nelson vainqueur d’Aboukir et de Trafalgar a dit en parlant du lieu : « Donnez-moi le golfe de Saint-Florent, et j’empêcherai qu’un seul vaisseau sorte de Marseille ou de Toulon… » Une autre preuve de son importance stratégique. Certainement un endroit où il fait bon vivre dans la douceur du maquis et des vagues… Mais nous ne faisons que passer ! Site : corsica-saintflorent.com
Retour à Nice…
La mer est d’huile ce matin, ce qui augure une belle traversée de jour que nous allons entreprendre ! Moby Dada est là… Faut dire au revoir à la Corse, à notre guide, notre chauffeur… Promis, nous reviendrons, très vite… avec Moby !
Reportage : Texte / Dany Antonetti – Photos / Gérard Antonetti
HEBERGEMENT COUP DE COEUR :
Hotel Santa Maria (3*) à Saint-Florent avec vue sur le Golfe. Paisibles et Cosy à la fois, 27 Chambres et 3 Suites juniors. A noter : le prêt de bicyclettes vintage aux clients et un excellent buffet-breakfast avec produits locaux (fromage & charcuterie) et délicieux gâteaux “maison”. Site : hotel-santa-maria.com
French Riviera Cruise Club : Cette année, la CCI de Nice fête les 10 ans du “Club de la Croisière” positionnant la Côte d’Azur comme une destination incontournable en Méditerranée. Infos : riviera-ports.com
Moby Dada en chiffres : Date de construction : 1981 ; Longueur : 168,05 m ; Largeur : 37 m ; Tonnage : 34.093 tonneaux ; Vitesse : 22 noeuds ; 606 cabines ; 1800 passagers ; 450 voitures. Site CCI Haute Corse : ccihc.fr