GRECE : RHODES, LA MEDIEVALE

Rhodes, c’est à la fois le nom de la plus grande île du Dodécanèse en Grèce et d’une superbe ville médiévale, qui mérite largement une étape.

La capitale de « l’île des Chevaliers » se situe à l’extrémité nord de cette île de la région de l’Egée Orientale, très proche de la Turquie, notamment de Bodrum et de Marmaris. Elle s’élève sur l’emplacement d’une ancienne cité grecque et commande un port autrefois embelli par le Colosse de Charès de Lindos, l’une des sept merveilles du monde selon les Anciens. 

Lorsque vous arrivez à Rhodes par avion ou par bateau, oubliez la cité moderne pour vous précipiter dans la ville médiévale classée au Patrimoine Mondial par l’Unesco en 1988.

Une riche histoire

Faisons un retour en arrière du temps des croisades. En 1291, les Chevaliers de Saint Jean de Jérusalem ont perdu Saint-Jean d’Acre leur dernier bastion en Palestine. Aussi dès 1309 et jusqu’en 1523, ils s’installent à Rhodes. Ils transforment la capitale de l’île en ville fortifiée capable de résister à de terribles assauts comme celui du sultan d’Égypte en 1444 et celui de Mehmet II en 1480. En 1522 au terme d’un siège de six mois mené par Soliman II, Rhodes tombe finalement aux mains des Ottomans. Ensuite la forteresse fut partiellement endommagée par un séisme en 1851 puis totalement détruite par une explosion de poudre en 1856. Résultat : l’actuel palais n’est pas d’origine. Les autorités italiennes l’ont fait reconstruire en 1937. Edifiée sur une colline, et entourée d’un mur de 4 km, la ville médiévale comporte au nord, une « partie » haute et au sud/sud-ouest, une partie basse. Séparée à l’origine de la ville basse par un mur fortifié, la ville haute fut totalement bâtie par les Chevaliers. 

Organisation de l’Ordre des Chevaliers

Comme à l’époque le concept de nation n’existait pas, cet Ordre comportait sept « langues », chacune ayant son propre siège ou « auberge ». Réparties de chaque côté de la « rue des Chevaliers », les « auberges des langues » d’Italie, de France, d’Espagne et de Provence servaient d’hébergement aux pèlerins se rendant à Jérusalem.

Entrez dans la vieille ville à partir du port de Rhodes, pour monter cette fameuse rue débutant près de « l’Hôpital des Chevaliers ». Vous trouverez l’Auberge de la langue italienne, le palais du Grand Maître français, l’Auberge de la langue française, l’Auberge de la langue espagnole et l’Auberge de la langue de Provence. La rue se termine devant le Palais du Grand Maître. Aujourd’hui encore, cet axe principal d’architecture gothique, reste entièrement préservé de tout magasin ou restaurant. L’Etat Grec y a installé des services administratifs relatifs au Patrimoine. Et la France son consulat.

Le Palais des Grands Maîtres

Qualifié également de Palais des Chevaliers, cet imposant château-fort dominant la ville, a été bâti à la fin du VIIème siècle par les Byzantins sur le site d’un ancien temple consacré à Hélios, dieu du soleil. Puis les Chevaliers de Saint-Jean l’ont agrandi et modernisé, dans un style rappelant le Palais des Papes d’Avignon, pour en faire un  centre administratif et de résidence aux Grands Maîtres de l’Ordre.

Deux tours massives encadrent la porte principale située en haut de la rue des Chevaliers. A ce niveau, vous pénétrez dans une vaste cour centrale décorée de dalles géométriques en marbre et surmontée de deux niveaux d’arcades.

Le palais compte plus de 150 pièces. Mais seulement 24 sont ouvertes au public. Elles abritent de nombreux objets retraçant l’histoire de Rhodes et des îles du Dodécanèse notamment des statues d’empereurs romains découvertes sur l’île voisine de Kos, un moulage de la statue du Troyen Laocoon et ses fils, chef d’œuvre de la sculpture Rhodienne, et une belle série de mosaïques de l’époque hellénistique.  

Le tour des remparts

Bastions, tours, archères, passages souterrains, l’enceinte de fortification de la cité médiévale constitue un étonnant exemple d’architecture militaire. En partie érigés sur les fondations de l’enceinte byzantine, les remparts de la ville médiévale ont été entretenus et reconstruits entre les 14ème et 16ème siècles, sous les Grands Maîtres. L’ajout de postes de tir d’artillerie compléta l’ouvrage. Au début du 16ème siècle, dans le secteur de la Porte d’Amboise, la courtine avait une épaisseur de 12 mètres avec un parapet de 4 mètres percé de bouches à feu. Les remparts mesurent 8 à 10 mètres de haut. 

Parcourez cette imposante muraille au cours de trois promenades : une au niveau de la rue à l’intérieur de la vieille ville, une plus basse, à partir du port de Mandraki pour accéder au fossé où se déroulèrent des combats lors des 2 sièges de la ville en 1480 et 1522. Sans oublier le large chemin de ronde qui permet de prendre de la hauteur. Il est accessible seulement en début d’après-midi (en prenant un billet spécial au Palais des Chevaliers). Ces balades permettent d’apprécier pleinement le travail défensif réalisé par les Chevaliers de l’ordre de Saint-Jean.  

A l’époque des croisades, chaque « Langue » était responsable d’un secteur précis de la muraille. D’où la présence de « postes de combats » correspondant aux sept « Langues » de l’Ordre des Chevaliers de St-Jean : France, Provence, Auvergne, Castille, Allemagne, Angleterre et Italie. Grâce aux blasons des Grands Maîtres de l’Ordre de Chevaliers de Saint-Jean figurant sur les secteurs édifiés sous leur commandement, les historiens ont daté les différentes phases de construction. D’ailleurs la plus grande partie de la muraille remonte au 15ème siècle. 

A la fin du Moyen Âge, l’influence des fortifications de Rhodes, ville « franque » longtemps réputée imprenable, s’exerça dans tout le bassin oriental de la Méditerranée.

Un superbe musée archéologique 

Depuis 1916, le Musée archéologique occupe l’ancien Hôpital des Chevaliers, situé à l’angle de la rue des Chevaliers, près du port de la ville. Sa construction commença en 1489 sous le Grand Maître de Lastic avec des fonds légués par Flouvianos son prédécesseur. Elle se termina 49 ans plus tard avec le Maître d’Aubusson. L’ensemble est de style gothique avec des éléments Renaissance.

L’entrée principale conduit à une cour intérieure où se dresse un lion en marbre, sur un sol en mosaïque provenant d’une église catholique du 5ème siècle. À l’étage, admirez les sculptures de l’époque des Chevaliers et des colonnes funéraires. Impressionnante par ses dimensions, la grande salle des malades abrite les dalles funéraires des Chevaliers – symboles de la chevalerie – et même un sarcophage romain qui servit de tombeau au Grand Maître Kornegian.  Dans les halls situés au sud de la galerie  se trouvent des sculptures rhodiennes allant de la période archaïque à la période romaine.  Plein de charme, le jardin du musée accueille d’autres sculptures comme la statue de la Victoire et des colonnes ouvragées de l’ère hellénistique. 

La ville basse

Avec une population de 5 000 habitants en 1522, la ville basse abritait de nombreuses églises, certaines d’origine byzantine. Après la conquête du sultan sur l’iîe en 1523, des églises furent transformées en mosquées. Ainsi dans le quartier turc, la Mosquée de Soliman, la plus importante de Rhodes, fut bâtie sur le site de l’Eglise catholique des Apôtres. Les autres mosquées ont pour nom : Kavakli Mestchiti, Demirli Djami, Peial ed Din Djami, Abdul Djelil Djami et Dolapli Mestchiti.

Haute de 30 mètres et comportant trois étages, la tour de l’Horloge – cadeau offert par Tachti Pacha aux Turcs lors de son passage à Rhodes en 1851 – sonnait les heures auxquelles les Grecs étaient autorisés à entrer dans la vieille ville. En effet à l’époque les Rhodiens étaient refoulés dans la ville moderne. Au fil du temps, la ville basse a accueilli des palais, des fondations de charité comme l’hospice Sainte Catherine, l’archevêché, le tribunal de commerce, des bains et des maisons. 

Edifiée par un ordre militaire et hospitalier issu des Croisades, cette ville médiévale vibre encore. Il faut se perdre dans le dédale de ses ruelles pavées et lever la tête pour s’extasier devant des maisons fleuries par des bougainvilliers. Pour regarder des minarets à proximité de clochers d’église. Voir des Rhodiens se déplacer en deux roues dans ces rues étroites. Rhodes, la médiévale reste une ville active et habitée. Mais attention au danger du sur-tourisme et de l’exploitation commerciale à tout va dans les rues envahies par les restaurants et les boutiques, comme par exemple Sokratous ou les places de la vieille ville.


Texte et Photos : Martine Denoune


CARNET DE ROUTE

Y ALLER : De Paris, il est possible avec une compagnie régulière de se rendre à Rhodes via Athènes. Pour un vol non stop, pensez à Transavia, filiale d’Air France qui dessert la destination en 3h40, à partir d’Orly tous les jours de début avril à fin octobre. Au départ de Nantes, la compagnie propose jusqu’à 2 vols par semaine (les jeudis et dimanches) et au départ de Lyon, 1 vol par semaine (le samedi). Comme Rhodes est également une escale des gros navires de croisière en saison, mieux vaut éviter de s’y rendre entre début juillet et fin septembre. 

HEBERGEMENTS : Coté hébergements, de nombreux clubs de vacances se trouvent dans la zone touristique située entre la ville moderne et l’aéroport, soit à une douzaine de km du centre ville. Les locations de courte durée sont proposées dans la ville moderne. Si vous optez pour loger dans la cité médiévale, mieux vaut voyager léger, vous repérer à travers les ruelles, et déchiffrer le grec moderne.

Le Co-Lab Rhodes pour un tourisme durable

La Grèce et en particulier les îles sont très prisées des touristes internationaux. A Rhodes, les Allemands, les Anglais et les Français constituent le tiercé des visiteurs. Les autorités rhodiennes cherchent à lisser les flux touristiques en incitant les touristes à découvrir l’île au printemps et à l’automne. Voire en hiver. 

Mieux, le gouvernement de la région grecque de l’Égée méridionale qui couvre les deux archipels des Cyclades et du Dodécanèse, TUI Group, la TUI Care Foundation viennent de lancer le Co-Lab Rhodes. « Ensemble, nous voulons faire de Rhodes, un exemple international pour le développement durable des destinations de vacances. L’industrie touristique locale et les partenaires internationaux souhaitent y développer des solutions concrètes » explique Evangelos Georgiou, chef des opérations du Co-Lab Rhodes. 

Ouverte à tous les intervenants du tourisme, cette initiative est prévue pour cinq ans. Les pros du tourisme travaillent donc sur des économies d’énergie en matière de transports terrestres, aériens et d’hébergement. Des solutions seront plus ou moins rapides à se mettre en place. Bien sûr, le Co-Lab soutient aussi les concepts de mobilité modernes sur l’île comme notamment les golfettes déjà opérationnelles dans la cité médiévale. 

Décarboner, protéger la biodiversité et l’environnement, former la population locale, autant d’enjeux pour réussir cette croissance durable. « De nouveaux concepts de gestion de l’énergie, de l’eau ou des déchets devraient réduire l’empreinte écologique du tourisme à Rhodes. Ainsi par exemple, il est question de lutter contre le gâchis alimentaire et de transformer des déchets organiques en énergie » poursuit Evangelos Georgiou.

Atteindre les objectifs de développement durable des Nations Unies, de l’Accord de Paris, et de neutralité climatique d’ici 2050, tel est le challenge de ces trois grands partenaires. Pas de doute, cette approche de la durabilité profitera aux locaux, aux voyageurs, à l’environnement et au secteur du tourisme.