ITALIE : La Région de Mantoue
À l’extrémité sud-est de la Lombardie, Mantoue se situe au coeur d’une fertile plaine basse autrefois marécageuse. Eaux, terres, palais, tours, églises… y racontent 25 siècles d’histoire. La ville fut créée sur les bords du Mincio en 2000 av. J.C. environ. Son nom viendrait de Mantus, l’équivalent du dieu Hadès chez les Étrusques. Et si les premières pages Etrusques ou Gallo-Romaines sont écrites dans les musées, les suivantes s’ancrent dans les rues tortueuses de cette cité-île dont le centre historique est inscrit au Patrimoine de l’Humanité de l’Unesco depuis 2008.
Mantoue est la ville natale du poète Virgile surnommé « le cygne de Mantoue » mais c’est surtout la capitale des Gonzague, souverains éclairés de la Renaissance, protecteurs des arts et des lettres dont la domination durera de 1328 (Ils prennent alors le pouvoir par un coup d’état) à 1707. Mantoue fut aux 15ème et 16ème siècles un des principaux centres intellectuels et artistiques de l’Italie du Nord. Elle a conservé un riche patrimoine auquel oeuvrèrent des artistes parmi les plus prestigieux de la Renaissance comme Andrea Mantegna ou Jules Romain.
Au 12ème siècle, l’architecte et ingénieur hydraulique Alberto Pitentino organise un système de défense de la ville en utilisant la configuration du fleuve Mincio de façon à entourer complètement le centre habité par quatre étendues d’eau qui forment les 4 lacs : Supérieur, du Milieu, Inférieur et Paiolo . Vue de loin, Mantoue ressemblait alors à une île à laquelle on accédait grâce à des ponts. Il en reste deux : le pont des Molini et le pont de San Giorgio. Mais au 17ème siècle, une forte inondation signa le début d’une rapide décadence : le Mincio, en emportant des matériaux solides, transforma les lacs en marécages malsains. Le lac Paiolo, au sud, fut asséché et la ville resta entourée d’eau sur trois côtés seulement ayant, jusqu’à aujourd’hui, l’aspect d’une péninsule.
En 1796, durant la campagne d’Italie, le siège de Mantoue, alors tenue par les Autrichiens dura près de 8 mois. La ville fut prise par les troupes de Bonaparte en janvier 1797. Mantoue retourna sous la domination de l’Autriche en 1815 avec le Congrès de Vienne. En1866, elle fut annexée au Royaume d’Italie.
La Piazza Sordello, médiévale, au coeur du centre historique est bordée par le palais des Bonacolsi, la Tour de la Cage (les malfaiteurs y étaient exposés jadis à la vindicte de la foule) et par le palais épiscopal dont la façade se distingue par deux atlantes soutenant un balcon. À l’Est, on aperçoit les bâtiments les plus anciens du palais ducal, la Magna Domus et le palais du Capitaine. Au Nord s’élève le dôme.
N’oublions pas que la région de Mantoue/Ferrare vient de subir le choc d’un tremblement de terre (20 et 29 Mai 2012) d’une intensité de 5,9° sur l’échelle de Richter : hélas, quelques victimes ont été recensées ainsi que de nombreux dégâts sur les monuments historiques. Pour que tout rentre dans l’ordre le plus rapidement possible, il faut donc que le tourisme continue à y apporter son apport économique. Suivez-nous et découvrez cette belle région d’Italie où la culture ancestrale le dispute au bien boire et au bien manger ! En route pour le chemin des saveurs…
Le Palais Ducal de Mantoue
Le Palazzo Ducale di Mantova (Palais Ducal de Mantoue) est un groupe de bâtiments construit entre les 14ème et 16ème siècles, par la famille Gonzague qui en fit sa résidence. Les bâtiments sont reliés par des couloirs et des galeries. Les intérieurs sont enrichis par des loggias et de grands jardins. Le complexe comprend 500 chambres et occupe une superficie d’environ 34.000 m2. Les œuvres les plus célèbres sont les fresques de la Camera degli Sposi, entièrement de la main d’Andrea Mantegna, situées dans le Castello San Giorgio.
L’Escalier monumental des Duchesses, construit au 17ème siècle conduit à la salle del Morone, dont le nom depuis 1494 provient de la toile du peintre véronais Domenico Morone. À l’étage noble du Palais du Capitaine se trouve la Première Chambre de Guastalla, avec une frise àfresques de portraits de la famille Gonzague. La Galleria Nuova (Nouvelle Galerie) est un couloir construit en 1778 qui relie l’appartement de Guastalla à l’appartement ducal. Elle abrite plusieursretables du début du 17ème et de la fin du 18ème. La galerie se termine par la grande Sala degli Arcieri (Salle des Archers), autrefois pièce de l’appartement du duc Vincent Ier. Ensuite on trouve la Galleria degli Specchi (Galerie des Glaces) qui a été construite par le bon vouloir de Vincenzo Ier comme une loggia ouverte avec un décor néoclassique ajouté dans la période 1773-1779. La voûte est décorée de fresques.
Le Palais du Te, immense villa romaine
Autre pôle d’intérêt à Mantoue, le Palais du Te. Une immense villa que l’architecte Giulio Romano(un des élèves de Raphaël) édifia pour Frédéric II Gonzague, entre 1525 et 1535, à l’imitation des villas romaines dont on retrouve le plan classique. C’est l’exemple du style maniériste primitif en architecture. L’hypothèse la plus plausible sur l’origine du nom de ce palais est que l’édifice a pris le nom du lieu où il a été construit : l’île Tejeto dont le nom fut abrégé en Te, où se trouvaient déjà des écuries seigneuriales.
L’intérieur est décoré avec faste : les fresques signées Benedetto Pagni ou Rinaldo Mantovano(le Mantouan) sont la plus fameuse curiosité du Palais. Les thèmes vont d’un Banquet olympiendans le salon de Psyché (Sala di Psiche) à des Chevaux stylisés dans le salon des Chevaux (Sala dei Cavalli) pour arriver au plus surprenant de tous, celui du salon des Géants (Sala dei Giganti) où ces derniers, grotesques, semblent surgir du Chaos créé par la colère de Zeus. Une incroyable et gigantesque BD ! Les salles offrent aussi des pavages en marbre qui varient en couleurs et dessins d’un endroit à l’autre (Malheureusement : interdiction rigoureuse de photographier aux journalistes dans les musées… et pas de photos disponibles en service de presse !)
Des personnages célèbres ont visité les lieux dont l’empereur Charles Quint venu à Mantoue en1530 élever le marquis Frédéric II au rang de duc. Une fois le Palais achevé, Frédéric installa sa maîtresse officielle, Isabella Boschetti, dans ce qu’il appelait son « Palais des illusions chatoyantes » (Palazzo dei lucidi inganni), entouré de bosquets et cerné des eaux du lac. Le Casino della Grotta (Pavillon de la Grotte) traduit bien l’esprit de son concepteur : une petite suite de pièces privées arrangées autour d’une grotte et d’une logetta, un balconnet couvert sur lequel s’aventuraient les courtisans après s’être baignés dans une petite cascade qui courait sur les galets, les coquillages et les porcelaines incrustés dans les murs et les parois !
Coups de cœur à Mantoue
Hôtel Casapoli 4* : Au coeur de Mantoue, l’Hôtel Casa Poli associe une atmosphère familiale relaxante à un accueil professionnel. L’Hôtel, outre son espace de réunion, possède un lounge bar où l’on peut se détendre en dégustant les plats de la cuisine locale. Atmosphère raffinée, design minimaliste et service de qualité : un séjour de luxe au coeur de Mantoue. L’Hôtel Casa Poli offre à ses clients un environnement unique et exclusif où les objets de valeur de l’aménagement côtoient harmonieusement le confort de la haute technologie. Site : www.hotelcasapoli.it/fr
Restaurant La Fragoletta : Le nom du restaurant situé au cœur du centre historique de Mantoue, tout près de la Place Sordello, vient de l’ancienne propriétaire, une actrice du 17ème siècle qu’on appelait « Fragoletta » à cause de son esprit et de sa vitalité. Celle-ci, après sa carirère, décida d’ouvrir un lieu pour recevoir ses amis qui se produisaient dans le théâtre voisin « Teatro Vecchio ». L’auberge eut parmi ses hôtes les plus illustres : Giacomo Casanova et Carlo Goldoni. Le restaurant d’aujourd’hui, inauguré le 23 septembre 1998 est géré par Giuseppe Maddalena.
Départ en bateau pour San Benedetto Po
A bord du Motonavi Andes Negrini on peut admirer la silhouette de Mantoue vue des eaux. Le fleuve Mincio (qui se pare en été de fleurs de lotus), seul affluent du Po à être navigable, le rejoint après une grande écluse : plus large, majestueux avec ses cygnes, ses échassiers et ses barques de pêcheurs. Après deux heures de navigation, nous arrivons à San Benedetto Po où nous attendent – à l’Office du Tourisme – le Maire, Marco Giavazzi, et la déléguée à la culture, Irène Nicoli, afin d’évoquer leurs projets pour la commune. Leur premier patrimoine : le monastère de Polirone qui a subi de graves dommages suite au séisme de mai dernier.
C’est l’un des plus grands et puissants monastères bénédictins d’Italie (avec Monte-Cassino, San Giovanni Evangelista à Parme et Santa Giustina à Padoue) qui fut fondé par les Canossa vers l’an Mil, au croisement du Po et de son affluent Lirone. C’est pourquoi on l’appela « Polirone » (aujourd’hui San Benedetto Po). Il est ensuite lié à Cluny, en 1077, dont il suit le style des édifices et les habitudes religieuses, dans le respect de la règle bénédictine. Mathilde de Canossa y est enterrée selon son désir en 1115.
Nous ne pourrons pas le visiter mais les travaux de soutènement sont en cours et le monastère rouvrira au public dès le printemps. Des fonds ont été récoltés un peu partout et notamment à l’Abbaye de Cluny (Saône et Loire). « Nous voulons, dit Irène Nicoli, élaborer une politique globale de développement touristique incluant notre patrimoine culturel mais aussi agricole, œnologique et gastronomique. Nous avons créé la « Strada dei Vini e Sapori Mantovani » (Route des Vins et Saveurs de la région de Mantoue) dans le but de cette communication globale ». Le joli Office de Tourisme propose une boutique des produits du terroir.
Aller à Canossa…
Qui ne connaît pas le dicton « Aller à Canossa » signifiant « céder, s’humilier devant quelqu’un… ». En voici la signification historique : Mathilde de Canossa a vécu au cœur de ce que les manuels appellent la « querelle des investitures ». L’empereur Romain Germanique, Henri IV, entendait assurer lui-même la nomination des évêques : il voulait une église docile face à la couronne. L’église de Rome, au contraire, se battait pour sa propre autonomie face au pouvoir politique. Hôte de la comtesse Mathilde dans son château de Reggio Emilia, le pape, Grégoire VII, accepte (1077) finalement le repentir de l’empereur, lui pardonne et lui donne le baiser de paix. Mais avant d’être admis en sa présence, Henri IV (d’Allemagne) a dû rester longtemps devant la porte du château en signe de pénitence, vêtu de bure, pieds nus dans la neige de l’hiver glacial qui a fait geler le Pô… Cet épisode, vieux de dix siècles, est devenu proverbial : aujourd’hui encore, « aller à Canossa » est synonyme de rétractation douloureuse et nécessaire. Grâce à la force extraordinaire du symbole (l’empereur qui s’humilie devant le pape) cet épisode fait date dans les domaines de la politique et de la propagande.
Dégustation du « Lambrusco » à la Coopérative de Quistello
Nous continuons notre périple à la découverte du vin local, le Lambrusco. « Transformer notre raisin en vin de tradition Lambrusco, dit Luciano Bulgarelli, Président de la Coopérative de Quistello, c’est notre métier, mais surtout notre passion. Notre association de viticulteurs date de 1928. Nous produisons notre vin à la fois grâce à l’expérience et à la tradition mais aussi à la technologie et l’innovation. Nous contrôlons toutes les phases de la production. Le cépage employé est endémique : il s’agit du Lambrusco Grappello Ruberti qui puise ses racines sur les terres du Po. La production annuelle tourne autour du million de bouteilles, dit Luciano Bulgarelli…Depuis 2009, notre Lambrusco possède un label de qualité de « Denominazione di Origine Protetta » (DOP). Sa spécificité est d’être un vin « frizzante » (pétillant) et léger. Il n’y a aucun rajout dans sa composition et la fermentation est naturelle. Elle est arrêtée avant que tout le sucre ne se transforme en alcool. Le Lambrusco est rouge rubis, développe des arômes de cerise et affiche seulement 11°. Il est qualifié « d’amabile » (aimable, moelleux). C’est un vin qui se boit dans l’année ». Aujourd’hui, pour coller à la demande du consommateur, il se conjugue aussi en rosé et en blanc ». La boutique de la cave propose aussi des produits du terroir comme la fameuse « Mostarde » ou le Parmigiano Reggiano.
Tortelli et Cappone dei Gonzaga… à l’Agriturismo « Corte le Caselle »
à San Giacomo delle Segnate
« Tradition, amour du travail, orgueil de nos origines constituent notre style de vie ! » déclare Gianfranco Candatori, le propriétaire de l’agritourisme. Notre agence agricole est construite sur 7 ha de terrains composés de noyers, noisetiers et diverses plantes autochtones. Un beau potager, un petit verger et une culture de maïs « Marano » (célèbre pour donner la meilleure Polenta) complètent nos plantations. Mais notre point fort, c’est l’élevage à l’air pur du « Chapon de Gonzague » (Cappone dei Gonzaga), des coqs « ruspanti » à la saveur unique, des canards (anatra), des pintades (faraona) et des dindes. Le chapon ne se trouvait pas seulement dans les poulaillers et les modestes cuisines de la région mais aussi sur les tables des Seigneurs du « Rinascimento » (Renaissance) et en particulier les Gonzague ! C’est pour cela que nous avons donné à nos chapons le nom de l’illustre famille ! Pour rendre uniques le goût et la qualité de leur viande, le dernier mois, je les nourris spécialement de son, farine de soja (non OGM) et de maïs. La garantie de retrouver les saveurs d’antan et pour quoi pas de se mettre à table… comme un Seigneur ! Les chapons sont vendus à partir d’octobre et pourront ainsi trôner sur les tables de Noël». En baladant dans la propriété, on constate, effectivement, que rien n’entrave la liberté des beaux chapons qui dégustent la belle herbe mantovana !
Précisons qu’un « Agriturismo » c’est le penchant de ce que l’on appelle en France « l’accueil à la ferme ». Sauf qu’en Italie, il doit répondre à un sérieux cahier des charges comme proposer aux touristes au moins 30% des produits de la propriété et 40% des produits des fermes voisines. Il y en a 250 dans la région dont 60% entièrement « Bio ». Le concept de l’agritourisme a sauvé de nombreuses exploitations agricoles en Italie. C’est un service personnalisé, dit Gianfranco, et on ne mise pas sur le taux de remplissage mais sur la satisfaction du voyageur !
Confectionner les Tortelli di Zucco avec Raffaella
Si Gianfranco veille au grain de ses chapons, son épouse, Raffaella s’occupe de la cuisine et de tous les travaux annexes. C’est elle qui va nous donner notre « cours de cuisine » ! Les « Tortelli di Zucco » appartiennent à la tradition de la cuisine familiale qui se transmet de génération en génération. Il s’agit de raviolis farcis d’un mélange de courge, biscuits amaretti, parmesan, noix muscade et moutarde mantovane. La tradition veut qu’on y ajoute simplement un peu de beurre et de parmesan pour les déguster… Au départ, faut préparer la pâte : de la farine et des œufs… C’est tout ! Néanmoins, faut un sacré coup de main pour malaxer… Raffaella explique « Cosi… Cosi… Gira… Gira…) Oui, moi je veux bien, « comme ça, comme ça… Tourne, Tourne… » mais ça ne donne pas la même chose que sous ses mains expertes ! Enfin, nous réussissons finalement à étaler la pâte, la couper en carrés réguliers auxquels on va ajouter la farce au milieu… Ensuite le plus difficile est de former les tortelli… Personnellement, les miens étaient plutôt moches et surtout très irréguliers ! Enfin, tout cela a finalement fini dans l’eau pour seulement 2/3 minutes et a pu prendre place dans nos assiettes pour notre plus grand régal. Au menu des festivités se trouvait aussi, l’inégalable chapon ! Puis, en dessert, la Tarte « Sbrisolona Mantovana » appelée ainsi à cause de sa friabilité : de tout petits morceaux se forment quand on la brise. Elle ne se coupe d’ailleurs pas, mais se brise !
Confectionnée à parts égales à base de farine blanche, farine jaune et sucre, ses ingrédients sont aussi l’amende, le beurre, l’œuf, la levure et parfois le Marsala. Elle est servie seule ou accompagnée de crème de mascarpone et se marie au Lambrusco. Autre produit traditionnel fameux ici : la moutarde de Mantoue. Le fruit acide est taillé en tranches et confit dans son propre jus. Ensuite caramélisé, il est additionné d’huile essentielle de moutarde. Cette moutarde est fabriquée à base de pommes, poires et melon blanc aux origines antiques (Isabella d’Este, Signora di Mantova, la conseillait comme reconstituant). La moutarde de « Corte Le Caselle » est préparée artisanalement suivant une recette familiale utilisant les fruits de saison à peine récoltés. Une superbe adresse, sympa et conviviale, pour s’arrêter et déguster la cuisine de Raffaella ! Site :
« Luppolajo » : la bière cultivée à la ferme…
A l’Agritourisme, Rinaldo Treccani, était convié au dîner pour nous présenter sa bière. « L’Agribirrificio Luppolajo » à Castel Goffredo, est né de la passion de la bière, dit Rinaldo, et de notre expérience dans la culture des céréales transmises de génération en génération depuis plus d’un siècle. Nos bières sont produites sur nos terres à partir d’un houblon rigoureusement sélectionné aux arômes uniques. « Luppolajo » signifie simplement « champs de houblon ». le houblon eut une courte histoire en Italie au 19ème siècle grâce à l’influence des Austro-Hongrois. Nous produisons des bières aux noms évocateurs : Bucolica, Georgica, Rosae, Eneide, Castellana (les œuvres de Virgile). Il y a seulement 4 ans que nous produisons de la bière. C’est mon fils Enrico, ingénieur agronome qui en a eu l’initiative. Il est désormais « Maître Brasseur » et « Sommelier de la bière ». Site : www.luppolajo.it
Tout savoir sur le Roi « Parmigiano Reggiano » à la Laiterie Agricole Mogliese
Ce matin nous avons rendez-vous à la Laiterie Agricole Mogliese avec Rolando Nadali, Président de la Coopérative, pour assister à l’élaboration du roi des fromages, le « Parmigiano Reggiano » fabriqué à partir du lait de la vache du même nom (La vache Reggiana est rousse, rustique et existerait depuis l’époque romaine). C’est un fromage à pâte pressée cuite qui est protégé depuis 1996 par une AOP (Appellation d’Origine Protégée). Un produit totalement naturel, sans additif ni conservateur. Son origine remonterait au 11ème siècle lorsque la plaine du Po fut asséchée pour devenir une zone de pâturage fertile. Ce sont les moines cisterciens et bénédictins qui seraient à l’origine de la recette. Le mot est relevé dans la première traduction du « Décameron » de Boccace dans l’expression « fromage permigean ».
« Tous les matins, dit Rolando, le lait est amené par les petits producteurs et il repose une nuit dans les chaudrons de cuivre (en forme de cloches inversées) afin que la crème se forme en surface. Celle-ci donnera le beurre. Ensuite, le caillé de la veille est mélangé avec le lait de la traite du matin (On y ajoute la presure) et chauffé à 55°. On extrait ensuite le caillé (notre photo) qui pèse environ 80 kg. Il faut 600 litres de lait pour faire une meule de 40 kg.
Après avoir été mis dans un torchon de lin, le caillé est moulé à la forme du parmesan. Le fromage est alors placé dans un bain salé pendant 23 jours puis mis en cave d’affinage jusqu’à 36 mois. Là, un robot est chargé de brosser et retourner les meules. Le parmesan Reggiano est un fromage de garde à la renommée internationale.
Fortement concentré en protéines, phosphore, oligo-éléments ; calcium, sel minéraux et peu gras, il est recommandé par les diététiciens. Même sa croûte qui n’a pas subi de traitement est comestible ! Les Maîtres Fromagers examinent les meules une à une et dispensent le sceau synonyme de la qualité issue du rigoureux cahier des charges. Côté consommateurs, il faut savoir que le sceau rouge indique un fromage vieilli au moins 18 mois, le sceau argent, au moins 22 mois et le sceau or, au moins 30 mois. Rappelons aussi que le « Grana Padano » ne répond pas aux mêmes critères que le Parmigiano Reggiano et possède sa propre AOP.
Pour la petite histoire, on prétend que le nom « Parmesan » lui fut donné en France parce qu’il fut dégusté pour la première fois à Paris en 1857 à la table de la Duchesse de Parme, épouse du Duc de Parme, Ferdinand, lui-même petit-fils de Louis XV… On raconte aussi qu’un morceau de parmesan fut le dernier repas de Molière !
Le Centre d’Education à l’Environnement de Sermide
Le Téléphérique qui abrite le centre d’éducation à l’environnement de Sermide est le plus singulier témoignage « d’archéologie industrielle » au bord du Po. En effet, opérationnel depuis 1900, il servait à transporter d’une rive à l’autre les betteraves sucrières qui y étaient cultivées. Aujourd’hui, récupéré et revalorisé, il reste témoin de la mémoire agricole tout en trouvant une nouvelle utilisation. De nombreux parcs naturels protègent l’environnement (Dont le Parco Locale Golenale del Gruccione su la commune de Sermide) et un circuit cyclable « Des Parcs » est en train d’être mis en place sur 160 km de Sermide à Suzzara. Par ailleurs, un nouveau musée de la Seconde Guerre Mondiale du Fleuve Po est en train de s’installer dans de nouveaux locaux à Felonica, l’ancien ayant été endommagé par le séisme de Mai 2012.
Halte à Carbonara di Po pour visiter la remarquable Villa Bisighini (19ème siècle) : Elle fut construite par Franco Bisighini, parti, jeune maçon, faire fortune à Buenos-Aires et revenu au pays entrepreneur millionnaire ! Mort sans descendance en 1953, il a légué la Villa à la Municipalité. Elle sert de Mairie et occasionnellement pour des réceptions.
Après la visite de la Villa Bisighini, nous reprenons nos bicyclettes pour parcourir une nouvelle fraction des pistes cyclables du Po. Destination : Borgofranco sul Po et son « Museo del Tartufo » (Musée de la Truffe). Sur ces terres, la truffe trouve un terrain idéal : c’est le royaume de la Tuber Magnum Pico, la fameuse truffe blanche (dite d’Alba) recherchée dans le monde entier. « La Route de la Truffe Mantouane » est une association qui a vu le jour en 2003 et dont la mission est de proposer aux touristes de nombreuses activités et évènements autour du précieux champignon.
Et comme il fallait mettre en pratique la découverte de la si convoitée truffe blanche, nous voici à l’Antica Locanda « Corte della Marchesa » à Carbonara di Po : une belle maison séculaire (15ème siècle) à la restauration architecturale raffinée tout comme la table.
Le jeune propriétaire, Marco Rampani, nous y accueille. La « Mamma » est en cuisine ! Nous y dégusterons un délicieux menu « Truffe ». Internet :www.cortedellamarchesa.com
L’après-midi, arrivée à Villa Poma où l’église du 11ème siècle à l’architecture romane, l’Oratorio di San Andrea di Ghisione a subi de graves dégâts dont la chute du clocher.
Au delà du Po, Suzzara est la « Città del Premio »c’est-à-dire de ce Prix Suzzara né en 1948 sur l’idée de Dino Villani et qui a constitué l’une des plus importantes expositions d’art contemporain (particulièrement figuratif). La Galleria del Premioconserve les œuvres des différentes éditions cependant, aujourd’hui, des tableaux religieux récupérés dans des églises endommagées ou menaçant de s’écrouler à cause du récent tremblement de terre ont trouvé leur place autour d’un concept intitulé « Sotto il terremoto » (Sous le séisme). L’installation des peintures au plafond, sur les poutrelles, veut mettre en exergue l’état d’urgence pour sauver les biens culturels.
Salame et Musée Paysan…
En route pour Moglia, direction l’Agence Agricole Corte Valle San Martino où Claudio Mezza a créé un joli petit musée de la Civilisation Paysanne, recueillant les objets de la vie quotidienne. Mais l’essentiel de l’activité de la famille c’est le cochon : de la naissance au produit fini… « Nous faisons, nous-mêmes, le porc, dit fièrement Claudio. Nos animaux sont nourris sainement et atteignent leur maturité vers l’âge d’un an (Ils pèsent alors environ 200 kg). Ils sont tués suivant le rituel ancestral et transformés en charcuterie avec les méthodes du 18ème siècle quand l’aïeul, Guiseppe Mezza commença la production. Les produits sont dédiés à ce lointain grand-père et s’appellent « I salöm dal Pepu Mesa » (Les saucissons de Guiseppe Mezza). Le produit phare est bien ce saucisson « fait à la maison » dit « Salam Mantuan Casalin » à la peau facile à détacher. Il est d’aspect gris blanc à l’extérieur et rouge-fraise à l’intérieur avec un gras à la forme régulière blanc et rose. Il a un goût spécial que lui donnent ses arômes naturels comme le poivre, l’ail frais, le vin ou les clous de girofle.
Au fil du Mincio puis du Po : la piste cyclable Mantova-Peschiera
Une expérience unique : partir de Mantoue pour rejoindre le Lac de Garde ! Une piste cyclable de 42,5 km, en pleine nature suivant la parcours du fleuve Mincio. Une des plus belles de l’Italie du Nord. Elle vous donne la possibilité de visiter : Bosco Fontana,le parc delle Bertone, et plus au nord, les beaux villages riverains de Volta Mantovana, Borghetto, Castellaro Lagusello, Monzambano, Ponti sul Mincio et enfin Peschiera del Garda. Une journée à l’intérieur du Parc Naturel del Mincio. Caractéristiques techniques de la piste Mantova/Peschiera : Départ : Mantova. Arrivée : Peschiera del Garda. Longueur : 42,5 km Dénivelé : nul / Circuit asphalté./Difficulté : adapté à la famille.
Pour notre part, nous avons parcouru deux morceaux de la piste du Po : d’abord autour de San Benedetto Po et ensuite de Carbonara di Po à Borgofranco sul Po. Le réseau des pistes cyclables permet ainsi de merveilleuses balades ou randonnées de toutes les longueurs !
Trois « routes gourmandes » permettent de sillonner tout le territoire, avec ses nombreux agritourismes et restaurants : La Route des Vins et Saveurs Mantouans « Strada dei Vini e dei Sapori Mantovani » ; la Route de la Truffe Mantouane « Strada del Tartuffo Mantovano » et enfin, la Route du Riz et du Risotto Mantouan « Strada del Riso e dei Risotti Mantovani ». Aujourd’hui, le fameux « Vialone None » est le riz le plus cultivé et le plus connu. Il donne lieu à d’innombrables recettes dont la plus populaire est le « Risotto alla pilota » préparé avec la saucisse. Anecdote : les piloti étaient les travailleurs des rizières qui n’avaient pas le temps de préparer les mets : ils eurent l’idée de ce risotto pour ne pas surveiller la cuisson du riz !
* Merci à Isabelle et Roberto Maggioni pour l’organisation sans faille de ce reportage. Merci aussi à Lara Rigoni et Cristina Gentiletti de la Province di Mantoue qui ont organisé tout ce voyage (www.turismo.mantova.it) et à Isabella et Paola du «Consorzio Oltrepòmantovano» parfaitement francophones et qui nous ont servi de guides pour ces 3 jours de reportages. « Le Consorzio Oltrepò mantovano est le fruit de l’expérience et de l’évolution des approches planifiées et programmées orientées à la transformation, à la requalification et au développement du territoire. À l’intérieur s’insère le projet District Culturel DOMInUS (District Culturel de l’Outre Po Mantovan pour l’Innovation, l’Unité et le Développement) financé par la Fondation Cariplo. Le Consorzio Oltrepò mantovano opère en qualité d’organisme reconnu de Développement Local pour l’orientation, la programmation, la coordination et la proposition d’initiatives pour le renouveau économique, social et culturel.
Site : www.oltrepomantovano.eu / LIENS : www.turismo.mantova.it